LEDDV.FR - Revue universaliste
Aucun résultat
Voir tous les résultats
  • Se connecter
  • S'enregistrer
  • Actualité
  • Analyse
  • Éducation
  • Culture
    • Lecture
  • Opinion
    • Tout
    • Chronique
    • Éditorial
    • Tribune
    Jaleh K. devant le mausolée du poète persan Hafez (né vers 1325) à Chiraz, en Iran, en décembre 2022. (DR)

    Au nom de « Femme, Vie, Liberté »

    JR Korpa/Unsplash

    « Le juif » n’existe pas

    Statue du chevalier de La barre, square Nadar, à Paris (Guilhem Vellut/Wikimedia Commons)

    Laïcité : serrer les rangs et passer à l’offensive

    De jeunes iraniennes défient le régime théocratique en ôtant leur voile islamique. Ici, en novembre, au pied de la tour de la Liberté, à Téhéran. (DR)

    Liberté pour le peuple iranien

    • Éditorial
  • Histoire
  • À propos
>> Je m'abonne au DDV !
LEDDV.FR - Revue universaliste
  • Actualité
  • Analyse
  • Éducation
  • Culture
    • Lecture
  • Opinion
    • Tout
    • Chronique
    • Éditorial
    • Tribune
    Jaleh K. devant le mausolée du poète persan Hafez (né vers 1325) à Chiraz, en Iran, en décembre 2022. (DR)

    Au nom de « Femme, Vie, Liberté »

    JR Korpa/Unsplash

    « Le juif » n’existe pas

    Statue du chevalier de La barre, square Nadar, à Paris (Guilhem Vellut/Wikimedia Commons)

    Laïcité : serrer les rangs et passer à l’offensive

    De jeunes iraniennes défient le régime théocratique en ôtant leur voile islamique. Ici, en novembre, au pied de la tour de la Liberté, à Téhéran. (DR)

    Liberté pour le peuple iranien

    • Éditorial
  • Histoire
  • À propos
>> Je m'abonne au DDV !
LEDDV.FR - Revue universaliste
Aucun résultat
Voir tous les résultats
Accueil Analyse

Brésil : faut-il brûler la « démocratie raciale » ?

L’expression « démocratie raciale » s’est imposée au milieu du XXe siècle pour caractériser un Brésil métis et non raciste. Depuis plusieurs décennies, elle est l’objet de contestations argumentées. Aujourd’hui, elle symbolise aux yeux des militants antiracistes le contraire de ce qu’elle désignait à l’origine : un Brésil fondamentalement raciste.

Le DDV Par Le DDV
17 avril 2021
dans Analyse
Temps de lecture : 8 min
A A
0
Dans l´État de São Paulo, le 20
novembre est férié, et dans tout le Brésil ce jour est celui
de la consciência negra (la conscience noire). Feira de
Santana est une ville de l´État de Bahia (V. C. Pereira dos Santos / Wikimedia Commons)

Dans l´État de São Paulo, le 20 novembre est férié, et dans tout le Brésil ce jour est celui de la consciência negra (la conscience noire). Feira de Santana est une ville de l´État de Bahia (V. C. Pereira dos Santos / Wikimedia Commons)

Partager sur FacebookPartager sur Twitter

Par Manuel Diatkine, docteur en Histoire, enseignant au lycée français de São Paulo
(Article paru dans Le DDV n°682, mars 2021)

« Devant le miroir : les blancs et l´antiracisme ». C’est une tribune publiée par le quotidien Folha de S. Paulo, le 22 décembre 2020, où l’on peut lire les propos suivants : « Notre société raciste est le résultat d’un projet séculaire », un projet porté par « les hérauts de la démocratie raciale – nostalgiques d’un passé qui n’a jamais existé ». Comment le sens de l’expression « démocratie raciale » a-t-il pu évoluer à ce point en l’espace de cinq décennies ?

L’expression « démocratie raciale » renvoie à l’idée que l’Histoire de la nation brésilienne serait celle d’un métissage heureux, qui serait sa vocation. Le thème apparaît dès le milieu du XIXe siècle, une génération après l’indépendance de 1822, mais ne cristallise dans les années 1930, en particulier avec la publication en 1933 de Maîtres et esclaves, de Gilberto Freyre. Dès les années 1940, des militants noirs antiracistes expriment des doutes sur cette vision idéalisée. Le discours démystificateur l’a aujourd´hui en grande partie emporté.

La critique d’un thème

Pour suivre l´évolution du débat public, un des meilleurs angles est la trajectoire d’Abdias Nascimento (1914-2011). En 2010, le président Lula signait le « Statut de l´Égalité raciale »[1]. Lors de la cérémonie, il regretta l’absence de l’intellectuel, artiste et militant Abdias Nascimento, l’une des grandes figures du mouvement noir brésilien.

Né dans un milieu modeste de l’ouest pauliste, Abdias participe dans les années 1930 à la première organisation politique moderne du mouvement noir, la Frente Negra Brasileira (FNB). En 1944, il crée le Teatro Experimental do Negro. Puisque les voies d’une carrière dramatique sont étroites pour les actrices et les acteurs noirs, il s’agit de monter une troupe pour affirmer la présence noire sur la scène, et au-delà de la scène. Dès lors, Abdias est acteur, activiste politique et journaliste, et de plus en plus critique à l’égard du mythe d’un « Brésil métis ».

Quelles sont les sources de cette évolution ? On peut en identifier trois. Tout d’abord, Césaire et la négritude : alors que la FNB tournait le dos à l’Afrique, l’exigeante réflexion du Discours sur le colonialisme (1950) a circulé parmi les militants afro-brésiliens. Ensuite, la lecture de l’Homme révolté de Camus, qui l’a marqué profondément. Enfin, des intellectuels afro-brésiliens s’affirment dans les années 1950. Parmi ceux-ci, le sociologue Guerreiro Ramos (1915-1982), dont Abdias est proche. En somme, las d’attendre une improbable « démocratie raciale », un groupe d’intellectuels afro-brésiliens a décidé d’interroger l’idée même de « Brésil métis ».

Démystification

Deux livres publiés en 1978 et 1980 ont théorisé la critique[2]. Métissage ? Le mot est récusé triplement. D’abord parce qu’il cache un fait historique sordide, les viols des femmes noires par des hommes blancs dans le cadre d’une société qui est esclavagiste jusqu’en 1888. Ensuite, parce que le métissage a dissimulé un projet explicite d’élimination des noirs du Brésil. Abdias n’a aucun mal à citer les nombreux auteurs du XIXe et du XXe jusque vers 1930, qui ont rêvé d’un Brésil sans noirs, précisément grâce au métissage, au motif que la race « forte », la blanche, éliminerait « la faible », la noire. D’ailleurs, l’appel à une immigration européenne avait explicitement pour but de « blanchir » le pays. Enfin, parce qu’à partir des années 1930, le Brésil qui s’affirme « métis » tourne en fait le dos à la négritude et à l’africanité.

Il s’agit de démystifier les points suivants : la division du peuple noir en catégories multiples, alors qu’une personne noire au Brésil est simple à définir : c’est « un descendant des Africains esclavisés » ; l’effacement des crimes de l’esclavage ; l’intolérance systématique de l’Église catholique envers les religions africaines ; la négation, puis la folklorisation (à des fins touristiques) des cultures africaines ; la négation du racisme au nom de la prééminence de la question sociale ; la mise en scène d’une « farce historique » selon laquelle l’abolition de l’esclavage, en 1888, serait un cadeau de l’élite blanche humaniste.

Quilombismo

Par quoi remplacer le récit d’un Brésil « métis » ? Abdias avance la notion de quilombismo. On appelle quilombos les très nombreuses communautés afro-brésiliennes formées par des esclaves fugitifs ou des libres, et cela dès les origines du Brésil. Il y eut des quilombos modestes, en dimension et en durée, et, aussi, des quilombos qui s’étendirent sur de vastes territoires, pendant plusieurs siècles. Après l’abolition en 1888, les nombreux quilombos ont persisté, et l’une des mesures les plus emblématiques de la Constitution de 1988 fut de reconnaître aux communautés la possibilité de posséder collectivement la terre. Les quilombos sont donc synonymes de résistance, et Abdias propose de transformer cette expérience historique en un substantif.

Le quilombismo désignerait l’ensemble des actes de résistance, une « praxis afro-brésilienne », bien au-delà du seul cas des communautés quilombolas. Appartiendrait au quilombismo, par exemple, la journée historique de 1978 au cours de laquelle fut lue à S. Paulo la Déclaration qui rendit publique l’existence du nouveau Movimento Negro Unificado Contra o Racismo e a Discriminação Racial : « Nous, Brésiliens noirs, orgueilleux de descendre de Zumbi… » – Zumbi étant la figure emblématique du quilombo de Palmares (Nordeste), qui a longtemps résisté aux Portugais. L’histoire du Brésil, si l’on devait bien la conter, ce ne serait donc pas d’abord l’histoire de la formation d’un peuple métis, mais d’abord l’histoire d’une résistance afro-brésilienne.   

Justice « raciale » et sociale

Depuis 1978, la critique du movimento negro a quitté les marges. Certaines de ses revendications sont passées dans la loi, par exemple ce qui concerne l’existence de l’enseignement de l’histoire de l’Afrique dans les programmes scolaires (2003), ou, surtout, la mise en place de quotas favorisant les citoyens afro-brésiliens à l’entrée des universités publiques (quotas raciaux et sociaux, d’abord dans l’État de Rio de Janeiro à partir de 2004). Amenée à juger de la légalité de la loi, la plus haute cour de Justice a parlé d’une réparation nécessaire de l’Histoire, et l’a validée. Le bilan de cette expérience est positif et la baisse de niveau redoutée par certains ne s’est pas produite.

Ce succès doit se comprendre dans le contexte spécifique du Brésil. Malgré des progrès, en particulier dans les années Lula (2002-2010), les universités publiques (et les meilleures du privé) étaient restées assez élitistes, peu accessibles aux classes populaires issues de l’enseignement primaire et secondaire public, alors que les enfants des classes aisées fréquentent des institutions scolaires privées. C’est ce blocage, cette discrimination de fait, que la légalisation des quotas a contribué à réduire de façon significative. Ainsi, la société brésilienne n´ayant pas su trouver les moyens d’une grande politique de démocratisation de l’enseignement supérieur, la discrimination positive en a tenu lieu.

De façon générale, les nombreuses associations afro-brésiliennes ont fait évoluer le Brésil. L’intolérance envers les religions africaines est débattue dans les médias, l’habitude de lisser les cheveux a commencé à se perdre, le nombre de personnes s’identifiant comme « negro/a » a augmenté lors des recensements et dépasse aujourd’hui 50%. Dans des contextes de plus en plus divers, la question de l’inégalité raciale est posée.

C’est peut-être dans le domaine de la recherche historique que les changements sont les plus spectaculaires. En effet, jusqu´aux années 1970, l’esclavage portugais et brésilien était méconnu et peu étudié. Tout a changé au cours des quarante dernières années où, aiguillonnés par les mouvements sociaux, les chercheurs brésiliens ont produit un travail remarquable pour établir les faits et conceptualiser. Le lecteur francophone trouvera dans un ouvrage coordonné par Jean Hebrard un riche aperçu de l´historiographie brésilienne sur le sujet[3].

Les risques de la racialisation

Toutefois, au Brésil comme ailleurs, l’articulation entre la différence et l’universel est délicate. Identifions trois problèmes, en nous appuyant sur l’article de la Folha de São Paulo cité en introduction. Les auteurs se mettent en scène, « nous, les blancs » – dans une perspective antiraciste : nous, les blancs, qui ne sommes pas assez attentifs au racisme. Mais, après avoir enseigné aux citoyens que la couleur de la peau était insignifiante, faut-il absolument que l’antiracisme lui enseigne désormais qu’elle est centrale ? N’y a-t-il pas là un risque d´offrir aux vrais racistes un boulevard argumentatif ?

Par ailleurs, si le métissage a servi un récit national, il est également une réalité sociale. Des millions de citoyens ont des ancêtres noirs et blancs ; diviser la population en deux catégories homogènes, comme le fait l’article, est une simplification abusive. Enfin « les blancs » sont invités à se voir tels qu’ils sont : « producteurs et reproducteurs de racisme », se préservant dans une prétendue position de « neutralité » (face aux problèmes sociaux du Brésil), liés par un « pacte qui soutient le privilège de la blanchité [branquitude] ». En somme, dans ce discours antiraciste, « les blancs » sont en quelque sorte « les koulaks » du discours stalinien des années 1930… Pourquoi ne pas lire ou relire dès lors les mises en garde de Raymond Aron sur les dégâts de l´idéologie ?


[1] Ce statut juridique est une loi qui dessine un cadre général d’action contre les discriminations visant les Afro-Brésiliens (travail, santé, culture, accès à la terre…). On note à la fin de l’article 3, parmi les principes qui l’orientent, « le renforcement [fortalecimento] de l’identité nationale brésilienne ».  

[2] Abdias Nascimento, O Genocídio do Negro Brasileiro. Processo de um Racismo Mascarado. S. Paulo, Editora Perspectiva, 2016 (1978); O Quilombismo. Documentos de uma Militância Pan-Africanista. São Paulo, Editora Perspectiva, 2020 (1980).  

[3] Jean Hébrard (dir.), Brésil quatre siècles d’esclavage. Nouvelles questions, nouvelles recherches. Paris, Karthala, 2012.

Étiquettes : BrésilDémocratie racialeQuilombismoRacialismeRacisme
Partager sur Facebook1Partager sur Twitter

À lire : Articles

Des jeunes dansent autour du feu et brûlent des foulards à Sari, en Iran. Le feu est, par excellence, le symbole de la purification dans la philosophie persane.
Analyse

Iran : genèse d’une contre-révolution

31 janvier 2023
Nous sommes nos montagnes, sculpture monumentale à Stepanakert, capitale de la République d’Artsakh. (Ani Adigyozalyan/Unsplash)
Analyse

L’Arménie en danger de mort

25 janvier 2023
Le Massacre de la Saint-Barthélemy (1572)
par François Dubois, peintre protestant
(musée cantonal des Beaux-Arts, Lausanne).
Analyse

La laïcité, un principe pour notre temps

17 décembre 2022
Unsplash/MChe Lee
Analyse

Enseignants et laïcité : vers une démission silencieuse

9 décembre 2022
Les dérapages nauséeux et répétitifs du carnaval d’Alost doivent être compris à l’aune du complexe d’Auschwitz. (James Arthur Gekiere/AFP)
Analyse

Excuser les bourreaux et salir les victimes

1 décembre 2022
Illustration de Charlotte Moreau pour Le DDV.
Analyse

Distinguer entre l’antisémitisme et le racisme

26 novembre 2022
Voir plus
Article suivant
Fête de l'Être suprême, le 8 juin 1794 (Musée Carnavalet, Paris)

Les principes républicains ne sont pas une religion d’État

Tsitsernakaberd Armenian Genocide Memorial Complex, Ծիծեռնակաբերդի խճուղի, Yerevan, Armenia (AP/Unsplash)

Génocide arménien : du négationnisme à la fabrique du déni

Les plus lus

  • Nous sommes nos montagnes, sculpture monumentale à Stepanakert, capitale de la République d’Artsakh. (Ani Adigyozalyan/Unsplash)

    L’Arménie en danger de mort

    35 partages
    Partager sur Facebook 35 Partager sur Twitter 0
  • [Podcast] Emmanuel Debono, rédacteur en chef du DDV, au micro d’Alexis Lacroix, sur Radio J

    1 partages
    Partager sur Facebook 1 Partager sur Twitter 0
  • Iran : genèse d’une contre-révolution

    10 partages
    Partager sur Facebook 10 Partager sur Twitter 0
  • Tribune de Simon Epstein : Zemmour d’un point de vue juif

    1892 partages
    Partager sur Facebook 1892 Partager sur Twitter 0
  • Quand les LGBT étaient laïques…

    21 partages
    Partager sur Facebook 21 Partager sur Twitter 0
  • Au nom de « Femme, Vie, Liberté »

    0 partages
    Partager sur Facebook 0 Partager sur Twitter 0
  • Brice Couturier : « Le wokisme tourne le dos aux valeurs universelles »

    28 partages
    Partager sur Facebook 28 Partager sur Twitter 0
  • Michel Foucault, patient zéro de l’islamo-gauchisme

    402 partages
    Partager sur Facebook 402 Partager sur Twitter 0

À lire

Jaleh K. devant le mausolée du poète persan Hafez (né vers 1325) à Chiraz, en Iran, en décembre 2022. (DR)

Au nom de « Femme, Vie, Liberté »

3 février 2023
Emmanuel Debono, historien, rédacteur en chef du Droit de Vivre (Stéphane Vaquero)

[Podcast] Emmanuel Debono, rédacteur en chef du DDV, au micro d’Alexis Lacroix, sur Radio J

1 février 2023
Des jeunes dansent autour du feu et brûlent des foulards à Sari, en Iran. Le feu est, par excellence, le symbole de la purification dans la philosophie persane.

Iran : genèse d’une contre-révolution

31 janvier 2023
LEDDV.FR – Revue universaliste

Le Droit de Vivre - Revue universaliste

« Rien de ce qui est humain ne m'est étranger » - Térence

» En savoir plus

Articles récents

  • Au nom de « Femme, Vie, Liberté »
  • [Podcast] Emmanuel Debono, rédacteur en chef du DDV, au micro d’Alexis Lacroix, sur Radio J
  • Iran : genèse d’une contre-révolution

Catégories

  • Actualité
  • Analyse
  • Chronique
  • Culture
  • Éditorial
  • Éducation
  • Entretien
  • Histoire
  • Lecture
  • Non classé
  • Opinion
  • Tribune
  • À propos
  • CGU
  • CGV
  • Cookies
  • Confidentialité
  • Mentions légales
  • Contact

© 2021 LeDDV.fr - Revue universaliste - Tous droits réservés.

Aucun résultat
Voir tous les résultats
  • » Je m’abonne au DDV !
  • Actualité
  • Analyse
  • Éducation
  • Culture
    • Lecture
  • Opinion
    • Éditorial
    • Tribune
  • Histoire
  • À propos
  • Se connecter
  • Créer
  • Panier

© 2021 LeDDV.fr - Revue universaliste - Tous droits réservés.

Bienvenue !

Se connecter

Mot de passe oublié ? Créer

Créer un compte

Renseignez le formulaire pour créer un compte

Tous les champs sont requis Se connecter

Récupérer mon mot de passe

Renseignez les champs pour récupérer votre mot de passe

Se connecter

Add New Playlist

Are you sure want to unlock this post?
Unlock left : 0
Are you sure want to cancel subscription?